Je fais un compte-rendu de ce petit soft qui répond comme un doux écho aux bons mots suintant du jeu ATTENTAT, présenté par Mickmack sur la même machine, et sur ce même forum.
POUVOIR
Année : 1986
Studio : Loriciels
Éditeur : Loriciels
Genre : mangez des pommes, et des pavés
Joué sur Amstrad CPC
Support : cassettes ou disquette
Dernier jour de campagne électorale dans un climat de tension politique extrême. Le dispositif policier chargé de la protection du député est particulièrement renforcé. Au même moment, quatre groupes de manifestants se dirigent vers la grande place de la ville…
Choisis ton camp… pour la guérilla urbaine !!!
(texte tiré de la boîte du jeu)
Les années 80, c’était quand même fantastique. On s’extasiait régulièrement devant les avancées technologiques, le Minitel me faisait rêver (et cauchemarder mon père en raison des factures à payer), les publicités pour le 3615 ULLA tapissaient les murs des grandes villes et le visage de François Mitterrand qui, au soir de son élection en 1981, était apparu graduellement sur tous les écrans de télévision à la manière des jeux vidéo qui se chargeront lentement sur Amstrad CPC quelques années plus tard, ça m’avait subjugué !
François Mitterrand, parlons-en : un fin chenapan, un fieffé tacticien. Honni par ses adversaires pour lesquels il incarnait à la fois Charybde et Scylla, redouté par ses pairs, on peut dire qu’il a réussi plus d’un tour de magie (noire ?) durant sa longue carrière politique. 1986 fut d’ailleurs une année charnière, tant elle a fait couler d’encre et ce, jusqu’à aujourd’hui ! Souvenez-vous : l’instauration de la proportionnelle à l’Assemblée Nationale, et ce chausse-trappe pour la Droite camouflé en tapis rouge pour le FN. Et puis, 1986 fut aussi l’année qui vit la sortie d’un jeu pour le moins original chez Loriciels, sobrement intitulé POUVOIR. La jaquette annonce la couleur – et non, pas seulement le rouge des Communistes ! Georges Marchais d’un côté avec des menottes et Jacques Chirac de l’autre, habillé en flic (on note même un masque à gaz fixé à sa ceinture !) et tenantune pomme une tomate, qu’un manifestant lui a sans doute préalablement jetée à la figure. En arrière-plan, votre œil avisé aura remarqué des CRS se détachant de la fumée vraisemblablement causée par des voitures incendiées. Oui, POUVOIR est un simulateur de guérilla urbaine entre les CRS d’un côté, et les manifestants en beau tee-shirt rouge de l’autre !
Si vous jouez avec un ami, l’un d’entre vous contrôle les CRS, et l’autre les manifestants. En cas de plaisir solitaire (mais sans bâton de joie, tout se faisant au clavier), vous incarnez les forces de l’ordre. Votre but sera de protéger la place de la mairie jusqu’à 21 heures, car le discours d’un député doit y avoir lieu. La partie commence à 15 heures, et chaque tour dure 15 minutes en temps fictif. Une partie complète est donc susceptible de s’étaler sur 24 tours. Et durant tout ce temps, des dizaines de manifestants vont vous mener la vie dure en tentant de s’infiltrer dans les ruelles parisiennes. Oui, POUVOIR est en réalité un jeu de stratégie au tour par tour, ponctué de petites phases d’arcade lorsque les deux groupes opposés se font face.
Les CRS apparaissent en bleu sur la carte, et les manifestants en rouge (c’est d’une finesse, ah ah ah !). Lorsque l’un des petits personnages (un sprite relativement laid) est blanc, cela signifie que vous le contrôlez durant le tour. Il y a alors plusieurs phases de jeu durant lesquelles il sera possible, pour les CRS, de se déplacer, de poser des barrières à des endroits stratégiques (six au maximum), de tenir sa place (ne pas bouger) ou au contraire de lancer l’offensive – pour cela, il faut que votre sprite de CRS soit sur une case adjacente à une case comprenant un manifestant. Une petite séquence d’action se lance alors, au bas de l’écran, et vous devez courir pour appréhender le manifestant tout en évitant ses projectiles – tomates, pavés ou cocktails Molotov. Punaise, ça rigolait pas à l’époque !
Lorsque l’IA (ou un ami qui joue avec vous) prend le contrôle des manifestants, ceux-ci sont susceptibles de se déplacer (et ils le feront, avec la place de la mairie en ligne de mire) et bien évidemment ils ne reculeront pas face à l’adversité. Si une rue est bloquée par une barrière, le manifestant devra, durant une phase d’arcade, courir et sauter par-dessus avec le bon timing – autrement il prend des dégâts, et s’il en prend trop, il disparait (meurt-il vraiment ?!). Il peut aussi décider de charger du CRS, ce dernier pouvant lui lancer une matraque à l’horizontal – ça ressemble à un laser, mais passons. Il sera donc une nouvelle fois question de timing : courir et sauter par-dessus la matraque pour en découdre avec le CRS au corps-à-corps – dans ce cas-là, la victoire revient automatiquement au manifestant (on ne disait pas encore casseur, à l’époque ?).
Bref, les CRS devront tenir jusqu’à 21 heures ou faire disparaitre tous les manifestants d’ici là – chose peu probable, tant ils sont nombreux. Ces derniers remportent la partie s’ils parviennent à la place de la mairie avant l’heure fatidique ou s’ils éliminent tous les CRS. Un jeu plein d’amour, en somme, que certains tribuns actuels à la diatribe bien pendue n’auraient pas renié sur le fond ! Maintenant, on ne va pas se mentir (nous ne sommes pas politiciens, nous) : d’un point de vue vidéoludique, POUVOIR n’a plus beaucoup d’intérêt. Pour 1986, il s’agit sans doute d’un jeu de stratégie honorable. Mais aujourd’hui, difficile de passer sous silence ses maps toujours identiques, le manque de clarté de l’ensemble et la simplicité extrême des phases d’arcade – pas ultra maniables, d’ailleurs.
Mais aussi limité, rébarbatif et inintéressant soit-il, POUVOIR tend à être réévalué à l’aune des récents évènements survenus en France : Notre-Dame-des-Landes, percée du Front National, Nuit Debout, probité intellectuelle et professionnelle foulée des deux pieds par nos élites et autres édiles embourbés dans leurs crapaudières, les grèves et manifestations à répétition, les écologistes convaincus d’exister, etc. Oui, POUVOIR est, sur le fond, un jeu commeon n’en fait on n’en fera plus – à la manière d’un MOKTAR sur Amstrad, ST et Amiga, sur un sujet différent certes, mais pour des raisons sociétales qui se rejoignent. Oui, dans les années 80 on pouvait presque tout se permettre. Est-ce que je le regrette, désormais ? C’est un vaste débat, mais je serais tenté de répondre par l’affirmative. Et puis si vous n’êtes pas d’accord avec moi, je vous fais péter un 49.3 !
POUVOIR
Année : 1986
Studio : Loriciels
Éditeur : Loriciels
Genre : mangez des pommes, et des pavés
Joué sur Amstrad CPC
Support : cassettes ou disquette
Dernier jour de campagne électorale dans un climat de tension politique extrême. Le dispositif policier chargé de la protection du député est particulièrement renforcé. Au même moment, quatre groupes de manifestants se dirigent vers la grande place de la ville…
Choisis ton camp… pour la guérilla urbaine !!!
(texte tiré de la boîte du jeu)
Les années 80, c’était quand même fantastique. On s’extasiait régulièrement devant les avancées technologiques, le Minitel me faisait rêver (et cauchemarder mon père en raison des factures à payer), les publicités pour le 3615 ULLA tapissaient les murs des grandes villes et le visage de François Mitterrand qui, au soir de son élection en 1981, était apparu graduellement sur tous les écrans de télévision à la manière des jeux vidéo qui se chargeront lentement sur Amstrad CPC quelques années plus tard, ça m’avait subjugué !
François Mitterrand, parlons-en : un fin chenapan, un fieffé tacticien. Honni par ses adversaires pour lesquels il incarnait à la fois Charybde et Scylla, redouté par ses pairs, on peut dire qu’il a réussi plus d’un tour de magie (noire ?) durant sa longue carrière politique. 1986 fut d’ailleurs une année charnière, tant elle a fait couler d’encre et ce, jusqu’à aujourd’hui ! Souvenez-vous : l’instauration de la proportionnelle à l’Assemblée Nationale, et ce chausse-trappe pour la Droite camouflé en tapis rouge pour le FN. Et puis, 1986 fut aussi l’année qui vit la sortie d’un jeu pour le moins original chez Loriciels, sobrement intitulé POUVOIR. La jaquette annonce la couleur – et non, pas seulement le rouge des Communistes ! Georges Marchais d’un côté avec des menottes et Jacques Chirac de l’autre, habillé en flic (on note même un masque à gaz fixé à sa ceinture !) et tenant
Si vous jouez avec un ami, l’un d’entre vous contrôle les CRS, et l’autre les manifestants. En cas de plaisir solitaire (mais sans bâton de joie, tout se faisant au clavier), vous incarnez les forces de l’ordre. Votre but sera de protéger la place de la mairie jusqu’à 21 heures, car le discours d’un député doit y avoir lieu. La partie commence à 15 heures, et chaque tour dure 15 minutes en temps fictif. Une partie complète est donc susceptible de s’étaler sur 24 tours. Et durant tout ce temps, des dizaines de manifestants vont vous mener la vie dure en tentant de s’infiltrer dans les ruelles parisiennes. Oui, POUVOIR est en réalité un jeu de stratégie au tour par tour, ponctué de petites phases d’arcade lorsque les deux groupes opposés se font face.
Les CRS apparaissent en bleu sur la carte, et les manifestants en rouge (c’est d’une finesse, ah ah ah !). Lorsque l’un des petits personnages (un sprite relativement laid) est blanc, cela signifie que vous le contrôlez durant le tour. Il y a alors plusieurs phases de jeu durant lesquelles il sera possible, pour les CRS, de se déplacer, de poser des barrières à des endroits stratégiques (six au maximum), de tenir sa place (ne pas bouger) ou au contraire de lancer l’offensive – pour cela, il faut que votre sprite de CRS soit sur une case adjacente à une case comprenant un manifestant. Une petite séquence d’action se lance alors, au bas de l’écran, et vous devez courir pour appréhender le manifestant tout en évitant ses projectiles – tomates, pavés ou cocktails Molotov. Punaise, ça rigolait pas à l’époque !
Lorsque l’IA (ou un ami qui joue avec vous) prend le contrôle des manifestants, ceux-ci sont susceptibles de se déplacer (et ils le feront, avec la place de la mairie en ligne de mire) et bien évidemment ils ne reculeront pas face à l’adversité. Si une rue est bloquée par une barrière, le manifestant devra, durant une phase d’arcade, courir et sauter par-dessus avec le bon timing – autrement il prend des dégâts, et s’il en prend trop, il disparait (meurt-il vraiment ?!). Il peut aussi décider de charger du CRS, ce dernier pouvant lui lancer une matraque à l’horizontal – ça ressemble à un laser, mais passons. Il sera donc une nouvelle fois question de timing : courir et sauter par-dessus la matraque pour en découdre avec le CRS au corps-à-corps – dans ce cas-là, la victoire revient automatiquement au manifestant (on ne disait pas encore casseur, à l’époque ?).
Bref, les CRS devront tenir jusqu’à 21 heures ou faire disparaitre tous les manifestants d’ici là – chose peu probable, tant ils sont nombreux. Ces derniers remportent la partie s’ils parviennent à la place de la mairie avant l’heure fatidique ou s’ils éliminent tous les CRS. Un jeu plein d’amour, en somme, que certains tribuns actuels à la diatribe bien pendue n’auraient pas renié sur le fond ! Maintenant, on ne va pas se mentir (nous ne sommes pas politiciens, nous) : d’un point de vue vidéoludique, POUVOIR n’a plus beaucoup d’intérêt. Pour 1986, il s’agit sans doute d’un jeu de stratégie honorable. Mais aujourd’hui, difficile de passer sous silence ses maps toujours identiques, le manque de clarté de l’ensemble et la simplicité extrême des phases d’arcade – pas ultra maniables, d’ailleurs.
Mais aussi limité, rébarbatif et inintéressant soit-il, POUVOIR tend à être réévalué à l’aune des récents évènements survenus en France : Notre-Dame-des-Landes, percée du Front National, Nuit Debout, probité intellectuelle et professionnelle foulée des deux pieds par nos élites et autres édiles embourbés dans leurs crapaudières, les grèves et manifestations à répétition, les écologistes convaincus d’exister, etc. Oui, POUVOIR est, sur le fond, un jeu comme